La petite-fille de Monsieur Linh. La petite-fille de Monsieur Linh.

vendredi 17 juillet 2015 par Elisabeth

On suppose que l’histoire se passe pendant la guerre du Vietnam, même si cela peut se produire pendant n’importe quelle guerre.
Monsieur Linh, un paysan (vietnamien) vient de perdre son fils et sa bru dans un bombardement, alors qu’ils étaient partis travailler dans une rizière. Il se rend sur les lieux, les voit morts. Un peu plus loin, leur bébé est couché les yeux grand-ouverts à côté de sa poupée. Le vieux paysan prend l’enfant et embarque immédiatement sur un cargo pour la France. Il est admis dans un centre de réfugiés asiatiques. Les familles qui sont déjà installées le respectent à cause de son âge mais se moquent de lui. Alors qu’il se risque à sortir du centre, il rencontre un homme, un Français, un autochtone qui vient de perdre sa femme. lui aussi est malheureux et a perdu ses repères.
Ils se voient tous les jours, se montrent des photos du passé, finissent par échanger, par penser qu’ils sont amis sans parler la même langue.
Un jour, Monsieur Linh est transféré dans un hopital psychiatrique, toujours en compagnie du bébé. Il veut s’enfuir et retrouver son ami qui l’attend tous les jours à la même heure, en vain.
Enfin, Monsieur Linh parvient à s’enfuir et à retrouver l’endroit où il rencontrait son ami.
Ils s’aperçoivent de loin, chacun sur leur trottoir. Monsieur Linh ne comprend pas ce que lui dit son ami qui le met en garde contre la circulation. Il traverse et l’accident se produit. Il est blessé mais ne meurt pas. Il résiste parce qu’on lui remet sa petite-fille dans les bras ; il doit vivre pour elle.
A ce moment, le lecteur apprend que c’est une poupée.
Alors tout devient clair sur la folie de cet homme qui a tout perdu et qui transfère sur cette poupée ce qui lui reste d’humanité. Il a besoin d’un but, l’avenir de sa petite-fille.
Il est dans le déni de la mort de l’enfant, sinon sa propre vie n’a plus de sens. Il observe de loin sa nouvelle vie dans une ville inconnue dont il ne parle pas la langue parce que son coeur et son esprit sont restés au pays. Il compare sans cesse ce port où il a débarqué et son village.
Dans " le rapport de Brodek " Philippe Claudel nous montrait également les conséquences de la guerre sur l’individu et sur la vie d’un village. Dans les statistiques, on ne parle que des morts aux champs de bataille. On ne compte pas ceux dont la vie a basculé à cause de la guerre. Quitter ses repères, recommencer, oublier et se souvenir et comme toujours dans l’oeuvre de Philippe Claudel, le regard de l’autre.
Son écriture, avec ses images et ses anaphores, nous fait entrer dans la vie intime de ses personnages. Leurs pensées et leurs interrogations deviennent les nôtres.



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